Qu’est-ce que l’agroécologie ?

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Qu’est-ce que l’agroécologie ?

L’agroécologie est beaucoup plus qu’une agriculture biologique améliorée.Très variée selon les écosystèmes et les sociétés, elle repose sur les paysans, le travail familial, l’autoconsommation, l’entraide, les savoir-faire, la nature plutôt que le marché.

Quelques extraits d’un article paru dans le n° 58 de l’ Ecologiste (juillet -septembre 2021), par Silvia PEREZ-VICTORIA, économiste et documentariste, par ailleurs auteure d’ouvrages sur les paysans, dont en 2018 : Le retour des paysans, Actes Sud.

L’agroécologie est née en Amérique latine dans les années 1980. Il s’agissait pour ses initiateurs, agronomes et paysans, de permettre à des populations agressées par un système agricole industriel et destructeur de reprendre en main leurs moyens d’existence. Partant d’une définition étroite, celle de « l’application de concepts et principes écologiques à l’agriculture », l’agroécologie s’est enrichie d’apports multiples, ceux d’écologues, d’anthropologues, d’économistes, de géographes, de politologues… Des liens ont été établis avec la sociologie rurale et l’histoire des paysanneries. Au delà des pratiques agronomiques, c’est la place centrale donnée aux paysans qui fait de l’agroécologie une approche véritablement innovante.

Longtemps confidentielle, l’agroécologie est reconnue par les instances officielles (Banque mondiale, ONU, CNUCED, FAO) devant les ravages environnementaux et climatiques causés par l’agriculture industrielle. Mais il y a parfois incompatibilité entre agroécologie et développement.

L’exemple du développement durable est emblématique. Dans le cas de l’agriculture, la durabilité est ce qu’ont fait les paysans et les paysannes pendant des milliers d’années, un travail qui nous a apporté des sols fertiles, une riche biodiversité, des pratiques culturales adaptées aux milieux naturels, une nourriture diversifiée. En 150 ans, mais surtout après la seconde guerre mondiale, le développement a dévasté ces savoirs et savoir-faire, détruit les sols, réduit les variétés végétales et animales. De fait, les politiques de développement, loin d’avoir permis un quelconque « rattrapage » des pays dans lesquels elles ont été appliquées, les ont appauvris et endettés.

L’auteur déplore que les instances officielles impliquées dans la transition agroécologique ne tiennent pas compte des agricultures paysannes vivaces dans plusieurs régions, allant parfois jusqu’à récuser le terme de « paysan » qui semble remettre en cause le développement et la modernisation.

En 2013, la 6ème conférence de la Via Campesina, définit : « l’agroécologie paysanne est un système social et écologique qui comprend une grande variété de savoirs et de pratiques ancrées dans chaque culture et zone géographique. Elle élimine la dépendance aux agrotoxiques et la production animale industrielle hors sol, et garantit une alimentation saine. Elle renforce la dignité, honore les savoirs paysans traditionnels et innovants et restaure la fertilité et l’intégrité de la terre. La production alimentaire du futur doit être basée sur un nombre croissant de personnes produisant de manière plus résiliente et diversifiée ».


Grâce aux mouvements paysans, l’agroécologie peut devenir aussi un outil de transformation sociale : luttes contre l’accaparement des terres et l’extractivisme, récupération de terres pour l’installation de jeunes, mise en place de réseaux de semences paysannes contre les multinationales semencières.

C’est dans les réseaux de formation, d’expérimentation et d’échanges entre paysans et paysannes que se trouve le véritable vivier d’innovations en matière de pratiques culturales adaptée à chaque contexte et aux milieux naturels concernés. Le travail se fait in-situ, au plus près de la réalité vécue par les paysans et les paysannes. La relocalisation de la production et de la commercialisation va à contre-courant de la mondialisation. La souveraineté alimentaire ouvre la porte à d’autres souverainetés (technologiques, médicales, …). le maillage d’un territoire avec de tels échanges permettra peut-être de faire basculer des agricultures industrielles vers d’autres modes de production et de distribution.

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